La Tête en bas

            Le soir du 25 décembre, nous avons fêté Noël en faisant un gros repas. Une quinzaine de personnes étaient installées autour de la table, dont 6 wwoofers, Mike, Ella (sa fille) et ses deux garçons (6 et 3 ans), l’ami d’Ella et sa fille (6 ans), ainsi que des amis de Mike – vous suivez toujours ?!

            Après le repas, Mike s’est lancé dans sa spécialité : l’animation ! C’est ainsi que nous en sommes tous venus tour à tour à imiter des bruits d’animaux, cachés derrière une porte, en attendant que les autres trouvent la bonne réponse. Cheval, poule, cochon, âne, éléphant, chien, chat… bref, ils y sont tous passés ! Mike s’apprêtait à changer de jeu lorsque Kaïa, Jevan et Stella – les trois enfants cités plus haut – ont supplié pour en faire un dernier. Une fois derrière la fameuse porte, ils ne tardent pas à faire entendre un bruit sourd. Vooooooonnnn… Nous, on reste dubitatifs, incapable de rattacher ce son à un animal connu. Trois minutes passent, les petits sortent et attendent nos questions.

Mike demande : « C’est un dinosaure ? »

Réponse de Kaïa : « Non, c’est après. Mais c’est avant l’homme. »

Restant tous muets, Kaïa lance alors la réponse de l’énigme, tout fier de lui : « C’est un Aborigène !!! »

- « QUOI ?! » s’écrie alors la demi-tablée de wwoofers occidentaux que nous formons. « Mais quoi ?!... » Nous n’en revenons pas nos oreilles. Ils imitaient le son d’un didgeridoo. Nous sommes tellement scotchés que nous ne savons même pas quoi dire aux mômes. Mike, lui, a l’air un peu gêné par l’ineptie proférée par ses petits-enfants et lance rapidement un autre jeu. Les parents des enfants, eux, ne cautionnent pas l’erreur de leurs bambins… mais ne les corrigent pas non plus.

            Dix minutes après les enfants se préparent pour aller au lit. Les adultes s’éclipsent et je profite de l’occasion pour parler avec Kaïa.

-          « Kaïa, pourquoi vous avez fait un Aborigène tout à l’heure ? Tu sais, ce n’est pas un animal… »

-          « C’est parce que j’ai vu une émission à la télé. »

Je crois que je ne vais pas tarder à vomir. Je ne sais pas ce qu’il y a de pire dans cette histoire : les enfants qui prennent les Aborigènes pour des animaux ; les parents qui ne corrigent une erreur que semble à mes yeux si grave ; ou que l’inspiration d’une telle méprise vienne d’un programme télévisé. Mais cette anecdote montre bien le travail sur les mentalités qu’il reste à faire en Australie.