A notre arrivée en Australie, la 6 février dernier, nous avons demandé à notre premier hôte, Paul Kennedy, si le racisme était présent dans la société australienne. Il nous a affirmé que non. Et puis, il y a eu cette affaire des gangs de bikers qui s’entretuent et l’émergence (ou la stigmatisation par la presse australienne) de groupes islamistes ou des îles du Pacifique sud (Fidji, Tonga, Samoa). Là, nos souvenirs s’entrechoquent et nous nous rappelons que les deux Coréens que nous avons rencontrés à la Yurtfarm ne se nommaient pas réellement Steve et Charlotte mais Dongyu et InA. Ils avaient décidé de troquer leur patronyme asiatique contre un autre sonnant plus occidental, peut-être pour trouver du travail plus facilement. Encore un exemple, les guichetières de notre banque internationale (HSBC pour ne pas la citée) portaient toutes des prénoms anglo-saxons (Cynthia, Anny…) alors qu’elles étaient toutes elles aussi asiatiques. Drôle de façon d’assimiler les étrangers… Leur faire changer de nom pour qu’ils fassent plus blancs.
A Eden, un musée a été consacré à cette histoire, le Killer Whale Museum. On y apprend notamment que, pendant 76 ans de chasse à la baleine, la compagnie de pêche de Davidson (« collaborateur » des orques) n’a perdu qu’un seul homme en mer grâce à l’aide d’Old Tom et de sa famille. Lorsqu’un homme se jetait à l’eau pour aller travailler directement sur la baleine, un des orques décrivait des cercles autour de lui pour le protéger des éventuelles attaques de requins. Et en cas de problème, une partie des baleines tueuses faisaient claquer leurs nageoires dans le port pour prévenir les secours.
Ca y est ! On y est arrivés ! On a quitté la yurtfarm, non sans mal mais on l’a fait. Nous devions prendre la route lundi mais malheureusement pour nous, la météo en a décidé autrement. En effet, nous avions fait une petite lessive dimanche et nos vêtements n’étaient pas secs lundi, à cause d’une grosse pluie cette nuit-là. Nous nous sommes décidés à quitter cet endroit magnifique mardi matin. Ce n’est que le troisième faux départ du voyage (après la panne de batterie chez René et Lina et la casse de la boîte de vitesse à Penrith) ! Après les embrassades et quelques larmes, nous avons donc pris la route, direction la côte sud-est de la Nouvelle-Galle du sud pour rejoindre Melbourne et le Victoria.
La matinée se complique sur la route lorsque nous voyons la jauge d’essence baisser à une vitesse fulgurante et aucune station service à l’horizon. Arrivés à la réserve, nous découvrons enfin un tout petit panneau indiquant une pompe. Ni une ni deux, nous suivons le petit signe miraculeux sur la route de gauche. Sauf que cette route s’avère particulièrement longue, sinueuse et TROP paisible à notre goût pour héberger une station. Choix cornélien : faire demi-tour jusqu’à Genoa, petit bled de la carte à 10 km sans être sûr d’y trouver de quoi faire boire Gargantua… OU… continuer sur notre lancée en espérant arriver à Mallacoota, ville balnéaire à 23 km mais pourvue d’or noir.
Les yeux encore émerveillés, nous reprenons la route de Melbourne. A peine avons-nous parcouru deux ou trois kilomètres que nous découvrons ce qui semble faire le quotidien du Victoria : des bois calcinés par les flammes. Sur le côté gauche de la route, il ne reste plus que des silhouettes noires d’eucalyptus. Çà et là, des volutes de fumée s’élèvent encore : cet incendie-là n’a que quelques jours… Etonnant, puisque l’automne a déjà bien détrempé ces terres. On repense alors aux feux qui ont dévoré l’Etat il y a trois mois, en plein été. On imagine avec quelle facilité les flammes ont pu se propager. Lors de notre séjour à la Yurtfarm, nous avons constaté que les écorces d’eucalyptus sont un excellent combustible… Un facteur aggravant dans le cas présent.