La Tête en bas

Devant votre intérêt général pour les incendies en Australie, nous avons décidé de faire un point sur la situation downunder.

Les feux ont débuté juste avant notre arrivée à Sydney, il y a maintenant quinze jours. Comme vous le savez certainement déjà, ils se sont déclarés dans l’Etat de Victoria (sud de l’Australie), au nord et à l’est de Melbourne. En quelques jours, ils ont causé la mort de dizaines de personnes (plus de 200 au total) et réduit en cendres les habitations de centaines d’autres.

La réaction de la population a été immédiate. A l’instar des Etats-Unis, le patriotisme est une notion très forte dans la culture australienne. Il n’est pas rare de voir flotter dans les jardins l’étendard bleu étoilé. Pas plus tard que ce matin, nous avons même croisé une femme en fauteuil roulant sur lequel claquait une bannière miniature.

Les victimes des incendies ont donc rapidement suscité l’émotion auprès des Aussies. Et une chaîne de solidarité s’est aussitôt mise en place. Des pompiers volontaires ont « accouru » de tout le pays (continent ?!) pour combattre les flammes… Un courage qui leur vaut d’être élevés au rang de « héros » dans les médias (le terme est ainsi employé). Les grands magasins ont placé près de leurs caisses des boîtes pour récolter les dons des clients. Le géant de l’agroalimentaire australien, Coles, diffuse même à la télévision des spots publicitaires annonçant que les bénéfices enregistrés dans la totalité de ses magasins le 27 février prochain seront reversés aux victimes des feux. Une grande preuve de générosité (qui lui permet au passage de dorer son image auprès du public).

Les médias, de leur côté, tiennent un discours sensationnaliste, à la limite du sentimentalisme « à l’américaine ». Les journaux télévisés sont truffés de témoignages de gens en pleurs, tandis que la presse écrite diffuse des cahiers spéciaux dans leurs éditions quotidiennes. La part belle est faite aux images, et c’est à croire que les photographes se sont donnés le mot « à qui fera le plus pleurer dans les chaumières » : maisons calcinées, poupées ou souliers d’enfant à demi fondus, carcasses de voitures dépouillées par les flammes... Mais l’événement le plus médiatisé a sans doute été le sauvetage… d’un koala ! (Oui, contrairement au kangourou, le koala ne se mange pas grillé !)

On en viendrait presque à oublier que, simultanément, le nord de l’Australie (Territoire du nord et Queensland) est en proie à de terribles inondations, sur des centaines de kilomètres. Au point que certains habitants se sont retrouvés sous la menace de crocodiles marins, à l’angle de leur rue…

Mais dans cette affaire des incendies, il est un aspect peu glorieux de la mentalité australienne qui a fait surface : le besoin de vengeance. Après les premières victimes, le premier ministre Kevin Rudd a presque été accusé « de ne rien avoir fait pour éviter ça ». L’homme est-il connu pour ses dons surnaturels ? Je ne crois pas. Mais l’assaut de ses détracteurs n’a pas fait mouche. En revanche, les journaux (télévisés et écrits) n’ont cessé de mettre en avant les enquêtes pour déterminer la cause des feux. « Ils veulent absolument trouver un coupable », nous a confié un ami après la diffusion du JT. Quelques jours plus tard, un homme est d’ailleurs arrêté. Pas un pyromane, non ! Juste un type qui avait dû passer par là peu de temps avant le départ des incendies et qui est soupçonné d’avoir négligemment jeté son mégot… Ce soufflet-là a dû lui-aussi retomber, car, depuis, plus de nouvelles de l’interpelé.

La place a été faite au deuil (national), avec une journée de discours des principaux responsables de l’Etat, et, déjà, à la reconstruction.

D.R.